(verlaine) ▽ Il pleure dans mon cœur Comme il pleut sur la ville, Quelle est cette langueur Qui pénètre mon cœur ?

Sentir le vent sur ma nuque, la douce chaleur d'un pâle soleil de printemps sur ma peau de pêche, tutoyer encore un peu le sable, jongler avec l'univers, te retrouver une nouvelle fois. Voilà, ce à quoi j'aspirais, rien de plus rien de moins, pourtant dans ce camion sombre, je ressassais les souvenirs. Mes souvenirs. J'étais une jument si docile, si calme et une battante. Aujourd'hui, ce n'était qu'une vieille jument réformée qui arrivait à l'académie. D'ailleurs, je me demandais bien pourquoi une aussi prestigieuse école me faisait venir en son ceint. En effet, je n'étais plus la fringante pouliche de mes débuts. Et dire, qu'il y avait un an de cela j'aurais été fière de participer à cette expérience. Là, maintenant, tout de suite, je voulais juste que l'on m'oublie, que l'on me laisse dépérir, et m'abîmer dans une mort certaine...

La secousse me ramena à la réalité, le chemin devenait plus caillouteux, malgré moi, mes naseaux se mirent à humer l'air et analyser l'endroit que nous approchions. Le parfum de la terre sèche qui venait d'être mouillée, une averse devait être passée par là, l'herbe chantant dans les parcs, le hennissement des chevaux. Pas de doute, nous étions arrivés. Les freins confirmèrent cette idée. Le battant de la porte s'abaissa soudain et un homme vint à ma rencontre. Je n'y fis même pas attention, j'étais blasée. Je le suivis sans rechigner. Il avait beau me parler calmement, d'une voix si douce, me caresser et faire comme si j'étais la chose la plus précieuse au monde, je ne m'y attardais pas. Bientôt, je serais dans un box à ronger à ma solitude, il me laisserait sans plus m'accorder un regard.

Tout se déroulait comme je l'avais prévu jusqu'à ce qu'un chien arrive comme un débile entre mes pattes. Non, mais il foutait quoi lui là ? Par réflexe, je me cabrai et tentai de me libérer des mains du palefrenier. La corde qu'il tenait s'échappa de ses doigts en cisaillant la chair par une brûlure, je n'y fis pas attention, et m'enfuis une fois que je sentis l'entrave se libérer sous mon injonction. Je ne savait pas ou aller. Juste assez loin de ces crocs acérés, assoiffés de sang. Ma course s'arrêta néanmoins, quelques mètres plus loin, quand des personnes du haras me rattrapèrent, j'étais toujours autant terrorisée, mais je les laissai m'emmener dans mon box. Pour une première impression, je pense que j'avais fais fort... ► Mael & Emma