Ezeckiel est un cheval vif et pas des plus facile. D'entrée de jeu ne fuyez pas, il n'y a aucun vice. Il est un peu brute de décoffrage et manque parfois de respect mais, ma foi, s'il vous lève un postérieur ou vous claque les dents au visage, une bonne remontrance orale fait généralement rentrer les choses en ordre. Il pousse et bouscule sans se faire prier, donc réglez ce petit souci et ça devrait passer à ce niveau-là. Mais attention, monsieur est têtu et devient vite rétif, héritage de jeunes années durant lesquelles il en a prit un peu plein la tronche. Plutôt que de se traumatiser il est devenu assez délicat à gérer. Mais là encore, rien de mortel, avec de la patience et en trouvant la bonne technique, vous y arriverez, c'est sûr. Doublé d'un cheval au sang à fleur de peau, à la puissance redoutable et terriblement sur l'œil qui se pointe ou fait demi-tour sur les jarrets pour fuir, Zecki est le cheval d'un bon cavalier. Ce trait assez paradoxal de son caractère tranche avec sa loyauté envers son cavalier si ce dernier la mérite, sa détermination, sa bravoure. Car il ne tremble pas pour une feuille ou un bruit soudain, non, loin de là. Mais ce qui se passe à sa gauche à tendance à le rendre plus délicat. Main à laquelle il préfère faire l'andouille ou véritable souci jamais trouvé en cinq ans ? A vous d'approfondir, moi je sais. Enfin, ce beau dunalino peut devenir un excellent compagnon, certes plein de tempérament mais assez crémeux dans le caractère une fois que son cavalier aura trouvé les boutons et lui aura prouvé que la méfiance n'était pas de mise entre eux. Il y aura sûrement de grands combats de volonté entre eux, avant, mais au moins, celui-là n'attaque pas et si son cavalier aime un peu l'éthologie ou ce genre de travail de confiance sans énorme contrainte, il pourra vite comprendre comment fonctionne Zeck' et faire de belles choses avec lui.

Ezeckiel est le produit d'un petit élevage familial de Guyane française. Né deux deux parents de race quarter horse importés des Etats-Unis, il a forcé l'admiration dès tout bébé. Une belle bouille, de la vivacité, une morphologie bien typée... Il a toujours été ce que l'on peut qualifier de très beau produit. Par contre, dès poulain il était rétif. Quand on tenta de lui mettre le licol, à quelques jours, pour pouvoir le sortir en compagnie de sa mère, il se montra tout de suite « difficile et capricieux, un véritable petit démon qui nous donnait du fil à retordre », dixit son éleveur. Le conflit de domination Ezeckiel Vs les Hommes s'engagea donc très vite et on ne peut plus s'étonner que cela ne donne un cocktail explosif de cheval rétif et manquant de respect. Une chance peut-être, mais il n'a pas été traumatisé, sinon avec son côté rétif il n'y a pas le moindre doute sur le fait qu'il aurait pu devenir méchant à proprement parler. Six mois de conflit, donc, d'affrontements et de défis tandis que Zeck' prenait du volume, grandissait, devenait superbe. Au sevrage, il fit le plus grand voyage de sa vie... Un beau matin, on entra dans le boxe de sa mère pour lui passer une longe au licol et on le fit sortir. Pensant sûrement de prime abord qu'il irait en pâture, il se sentit bien bête lorsque môman resta sans lui, à l'appeler et à se pointer. Lui fit de même, sauf que bon, il avait moins de force que les hommes qui le menaient. Il se retrouva embarqué sans bien comprendre dans un van et roula quelques heures. De là, il prit l'avion. Le tout sous ses petits hennissements aigus et à fendre le cœur de n'importe qui. Bébé rejoignait l'Europe.

C'était une jeune française qui l'avait acheté. Elle avait quatorze ans et se croyait meilleure cavalière qu'elle ne l'était. Elle était sûre de pouvoir attaquer le débourrage d'un entier. Les débuts ne furent pas simples entre eux, puisque Eze' était relativement rétif pour tout ce qu'elle entreprenait. Mais elle eut assez de patience pour faire sortir un peu de son bon côté et le petit commença à travailler en liberté, y prenant même goût. Il avait des prédispositions certaines à cela, avec la main droite pour main de prédilection, son grand œil noisette toujours braqué sur sa cavalière. A dire vrai, c'était une relation sans grande complicité puisque la jeune fille préférait voir son copain et ses amies que de s'occuper de son poulain, ne s'en servant que pour frimer. Elle attaqua son débourrage au filet et à la selle à deux ans et cela se passa relativement mal. Le jeune entier ruait dans tous les sens et refusait de se laisser brider. Nouveau rapport de force avec le débourreur chez lequel elle l'envoya. Rien ne se passa bien. L'homme brisa plus ou moins sa fierté d'étalon pour pouvoir le brider. A son retour chez sa propriétaire, il était encore plus rétif. Elle s'essaya au western avec son cheval et comme il n'était pas top là dedans, elle le revendit.

Le jeune Ezeckiel, trois ans et demi à peine, atterrit chez un garçon de dix-sept ans. On aurait pu croire qu'il continuerait d'être rétif, avec son mauvais passage par l'homme, tout ça... Mais monsieur Zeck' s'y fit très bien puisque le cavalier avait de la patience et reprit pour beaucoup le débourrage de son cheval puisqu'il comptait en faire un cheval de monte classique et qu'il le voulait polyvalent. Second débourrage bien plus serein et le jeune cheval commença à toucher à tout. Il dressa pas mal mais en traînant la patte, il se mit à l'obstacle, au cross, au horse-ball, fit du carrousel... Il avait un bon petit coup de patte mais regardait un peu tout. Dans les disciplines de jeu et de contact, il était plutôt vaillant, même si parfois il avait de drôles de tocs quand on le remontait par la gauche. Ca avait au moins le mérite de le faire aller de l'avant. La relation allait bon train et cavalier et cheval s'entendaient fort bien puisque le jeune homme prenait le temps de s'occuper de sa monture d'une manière un peu exclusive il faut l'avouer. Il y avait les cours et Ezeckiel. Chose qui convenait très bien au beau dunalino qui était plein de sang et avait donc la belle opportunité de sortir chaque jour de sa cage. Tous les contes de fée ont pourtant une fin et lorsque son cavalier dût partir faire ses études, il préféra vendre son cheval, qu'il aimait pourtant énormément, mais préférant le savoir bien avec quelqu'un qui s'en occuperait plutôt qu'à se morfondre dans son boxe sans aller au paddock avec les copains puisqu'il était resté entier. Il chercha donc une bonne maison pour son quarter et c'est ainsi qu'il trouva l'académie, toujours chercheuse de chevaux de potentiel.