Reprise du boulot, enfin ! A dix heures, j'avais une reprise de saut d'obstacles avec des cavaliers confirmés. Zack, le débourreur, prenait sa petite Piremli. Mylène n'aurait qu'à prendre Piazor, tiens, ce serait bon pour l'un et l'autre et puis l'akhal commençait à s'en sortir pas trop mal, il manquait juste de confiance. Céleste monterait Vertigo, un petit nouveau qu'on avait à l'essai. J'espérais que ça irait... Et ma petite chérie - j'ai nommé Kayleigh, pour ceux qui n'en sauraient rien - monterait Hadès. Gentil mais couillon, mais il avait intérêt à se tenir à carreaux, sinon il allait manger une paire de longes enrênées dirigées par mes soins, et je peux vous jurer qu'il rentrerait dans les rangs avec un peu de boulot. Finalement, il y avait encore une cavalière, Tiffany, à qui on avait pu attribuer le petit Pompéi tout gentil. Que tout le monde se rassure, entre Pir' et son débourrage, le nouveau à l'essai et Pia' qui était en presque débourrage mine de rien, j'avais prévu une petite séance bien sympathique. Au fait, je précise qu'on n'avait pas prévenu les cavaliers que j'étais le moniteur du jour. Sûrement pour ça que j'avais du monde...

Toujours est-il qu'avec une épaule encore immobilisée et deux côtes cassées, j'avais bien miséré à mettre en place mon dispositif. J'avais mis le strict minimum. Sur une grande diagonale un vertical, sur une petite un oxer et sur la piste une ligne à six foulées vertical-oxer. Pour la détente, les taquets étaient rangées et les barres posées au sol. Je n'avais plus qu'à attendre mes cavaliers, en fait. Il était dix heures moins cinq et donc ils ne tarderaient pas trop. Je m'assis sur la lice en les attendant, ce qui me fit plutôt grimacer quand je me hissais là-haut. Je les laissais arriver, les saluant un part un d'un signe de tête. Enfin, sauf pour ma chérie qui eut le droit à mon fameux petit sourire en coin à croquer et à un "Love you" esquissé par mes lèvres. Mais pour le moment j'allais essayer de rester professionnel, chose pas simple en soi. Finalement, ils furent tous là et j'attaquais la reprise. Tout d'abord, je descendis de mon perchoir pour me mettre au milieu de la carrière et pouvoir faire un rapide briefing.

« Bonjour à tous. Aujourd'hui on fait une petite séance tranquille pour conduire un peu sur barres, un mini parcours tout simple et on va adapter en fonction des difficultés éventuelles de certains chevaux pour tel ou tel virage par exemple. Je vous laisse détendre en simple observateur pendant dix minutes, sur le plat seulement. Vous avez le temps de vous faire à vos chevaux, tout ça. Après je vous aiguillerai si besoin et je serais bien entendu à l'écoute pour toutes les éventuelles questions. Vous aurez encore dix minutes pour finir votre détente sur le plat et aussi passer un peu les barres au sol dans tous les sens et aux trois allures tranquillement. Questions? »

Dit avec calme et sans froideur. Et avec une ébauche de sourire, s'il vous plaît ! Hop hop hop les gens!

Et j'étais là depuis un petit moment maintenant, quelque chose comme trois semaines, non ? En tout cas, depuis mon arrivée dans les parages je n'étais pas montée à cheval parce que j'avais besoin d'une bonne remise en jambe avant de me sentir prête à monter seule. J'avais donc intégré une reprise qui démarrait à dix heures tapantes ce jour et je montais Vertigo. Aucune idée de qui c'était, ce cheval, m'enfin, j'y allais quoi. Il y avait juste précisé l'embouchure qu'il lui fallait et à vrai dire il s'agissait juste d'une mors simple avec une muserolles combinée, rien de bien lourd, rien qui ne laissait présager un cheval exécrable. Mais, mais, mais... Comment je savais tout ça moi ? C'était remonté tout seul à la surface. Tant mieux j'ai envie de dire. Mais un peu flippant. J'étais donc partie prendre le matériel nécessaire pour préparer le fameux Vertigo.

Sans m’appesantir sur le pansage, je dois juste vous dire que j'avais fais attention. Pas de gestes brusques, beaucoup de patience, beaucoup de méfiance aussi pour ne pas me faire attraper les doigts par exemple ou encore beaucoup de détermination pour parvenir à mes fins sans me faire marcher sur les pieds. Le cheval se retrouva donc sellé, bridé et protégé tout de noir. Tapis noir à liseré blanc, guêtres en cuir noir, cloches noirs, filet noir avec des surpiqûres blanches, selle noire avec des surpiqûres blanches. Même la sangle à bavette était noire. Du coup j'étais prête à l'heure pour aller monter et je sortis le cheval du boxe. Je pris ma bombe sous le bras avant de passer les rênes au dessus de l'encolure, histoire de les avoir bien en main, pour pouvoir me rendre à la carrière d'obstacle, où il y avait déjà du monde. Je saluais un peu timidement, avant d'aviser qu'il y avait Kayleigh, que je connaissais depuis la fête de Flo'. Je lui fis un joli sourire. J'arrêtais ensuite ma monture au milieu de la carrière.

Là, je pris le temps de le ressangler et de prendre un à un les antérieurs pour les étirer devant, méfiante tout de même. Cela permettait d'étirer la peau éventuellement coincée sous forme de plis sous la sangle qui aurait pu soit pincer soit irriter le cheval. Je vérifiais rapidement la pause des guêtres avant de resserrer d'un trou la muserolle et de passer les rênes au dessus de l'encolure du cheval. Je montais alors dessus, tranquille, et la dernière cavalière arriva, ce qui donna lieu au petit speech d'un blond d'approximativement mon âge avec un bras en écharpe. Apparemment c'était lui qui donnerait le cours. Lorsqu'il eut fini de parler, je mis le cheval au pas. Sur les dix premières minutes, je fis une prise de contact tout en douceur, avec des flexions, des déplacements de hanches, des épaules en avant et en dedans au deux mains, au pas et au trot, cherchant à incurver le cheval aussi, pour qu'il vienne se tendre tranquillement sur la main.

Jesse Ҩ Ses cavaliers

« Everybody jump, come on ! »

Et hop, en cours s'il vous plaît ! Les cavaliers arrivèrent un peu au compte-goutte. Tout d'abord il y avait eu Zack arrivé avec Piremli, la petite de Kessedag qui venait de finir son débourrage. C'était son entrée dans la cour des grands, en quelques sortes. On allait y aller tranquillement pour la crevette, de toute manière, mais j'avais plutôt espoir. A moins qu'elle ne tienne de papa, et là, on ne serait pas sortis de l'auberge ! Si c'était Piazor², je vous jure, j'abandonnais d'avance. Puis vint ma petite chérie sur le petit Hadès, qui était un cheval assez amusant. Couillon, débile sur les bords, avec deux fils qui se touchaient des fois, mais aussi plutôt gentil, plein de potentiel. Si on arrivait à le mettre dans le boulot, ça devenait une bonne petite bête quoi. D'ailleurs ma chérie fondit tout de suite en me voyant. Mais que j'étais content ! Avec mon petit sourire à crever je la regardais, et j'eus le droit à une réponse à mon murmure inaudible. Une réponse toute aussi tendre. Mais voilà hein, il fallait que je reste concentré. Entra alors Céleste – que je ne connaissais pas – et notre petit nouveau. Il avait belle allure le grand piou là. Dans le style doré plus foncé que Pia', plutôt élégant. Un cheval de haute école, assurément. Par contre... Il était plus stylé dressage si vous voulez mon envie. Enfin bref. Nous rejoignit Mylène et mon Pia' national. Vu sa tronche il était enchanté celui-là et on allait « rire » pendant la séance. Non mais ce serait peut-être drôle de dehors mais connaissant la bête je ne rirais pas pour la cavalière et elle non plus. Entrant alors en scène Tiffany, ma toute dernière cavalière de la séance.

Ouaip, c'était bon ça. Les premiers arrivants avaient commencé à marcher un peu. Je laissais le temps à ma dernière cavalière de se mettre en selle avant de faire mon petit speech. Bon bah déjà tout le monde était attentif. Et pas de questions sur la suite de la séance. D'un autre côté ils avaient tous l'air bons cavaliers donc à vrai dire la détente ça devait rester dans leurs cordes. Je regardais les cavaliers se mettre en route. Mon regard se porta directement sur Vertigo. Céleste faisait un peu petite là-haut mais visiblement elle ne se laissait pas démonter du tout sur la grande bête. Surtout qu'il n'avait pas l'air méchant. Il venait chercher la main et se pliait aux exigences de sa cavalière. Par contre il ressemblait à une anguille à foutre son cul à quatre-vingt-dix degrés au milieu quoi ! Il allait vite me gaver s'il jouait les spaghettis entre les jambes de sa cavalière ! Non mais bon, voilà quoi. Mais bon, jusque là elle gérait et je retins mon envie de lui donner un conseil. J'avais dis dix minutes ! N'empêche, maintenant je me retenais de parler quoi... J'appelle ça de l'évolution de malade. Mouais, bon, passons. Y'avait un Piazor qui ne voulait visiblement pas faire voir qu'il était capable d'autre chose que de faire une sale tête. Oh je ne vous dis même pas ce bazar... A côté de ça, il y avait Pompéi, égal à lui-même, plutôt concentré, c'était tip top ça. Mouais, 'fin ils avaient le temps de détendre quoi !